dimanche, novembre 28, 2010

Les Baux de Provence... par Michèle.


LES BAUX DE PROVENCE

16 oct. 2010







L’arrivée sur le village est impressionnante : un univers chaotique, désordre minéral fait d’éboulis de roches et d’aiguilles acérées qui, comme des guerriers, monteraient la garde pour interdire toute approche. Et le château, ancienne forteresse, où plutôt ce qu’il en reste, se confond totalement avec le large éperon rocheux dénudé sur lequel il est accroché qui domine la plaine de la Crau jusqu’à la mer. Baux, Balc, signifie « escarpement ».

Construit au 10e S par Isnard, début d’une lignée de seigneurs ambitieux et conquérants jusqu’à la démesure et s’imposa en Provence au gré des luttes, intrigues et alliances. Selon Mistral « Race d’aiglons jamais vassale ».

Au 12eS ils prirent comme devise « Au hasard Balthasar » entretenant la légende de leur descendance de ce Roi Mage, d’où sur leurs armes l’emblème d’une étoile à 16 raies d’argent.

En 1162 après la défaite face aux Comtes de Provence, le château est rasé, mais bientôt reconstruit.

Nouveau déferlement de violence fin du 14e avec Raymond de Turenne, tuteur de la jeune Alix des Baux, surnommé le fléau de la Provence. Ce seigneur brigand sema la terreur dans toute la région et rançonnait à tout va. Ceux qui ne pouvaient pas payer étaient précipités du haut du rocher. D’une cruauté sans nom il était d’une jalousie morbide ; il tua sa maîtresse dans un accès de rage, préleva son cœur qu’il cuisina et le servit à sa femme. L’histoire ne dit pas si elle s’en régala !

La seigneurie des Baux échut par héritage à René d’Anjou, dit « le bon Roi René » puis ensuite dans les mains du roi de France.

François Ier vint visiter la place-forte des Baux où il fut accueilli avec des fêtes somptueuses par la noblesse et plein de jeunes et jolies filles. L’une d’elle attire son attention et il l’invite ; elle semble ne pas lui résister mais, très vertueuse, expose son visage aux vapeurs de soufre. Défigurée elle se cache sous un voile et le roi est rempli d’effroi lorsqu’il la voit. Il dira qu’il n’a pas pu consommer son casse-croûte ! Comme courtoisie il y a mieux ! Ensuite on vantera partout la grande vertu des jeunes filles des Baux.

Avec la Réforme qui se répandit dans la ville les passions se déchaînent. Ses partisans s’emparèrent du château, ont détruit la chapelle et jeté les reliques de Sainte Catherine dans un puits. Du temple de l’époque, démoli par la suite, il reste une fenêtre conservée sur laquelle la devise « Post tenebras lux » (après les ténèbres la lumière) est toujours visible.

Sous Louis XIII et suite à une révolte du Parlement d’Aix ce château qui narguait la puissance royale fut assiégé et les remparts démantelés. Les habitants durent racheter le château, mais totalement impécunieux ils le laissèrent démanteler par des petits entrepreneurs de la région.

En 1642, le Roi rachète le château, totalement en ruine, et en fait cadeau aux Grimaldi pour les remercier d’avoir chassé les Espagnols du Rocher. Ils deviennent ainsi Marquis des Baux, titre uniquement honorifique maintenant.

Pour accéder au château on traverse le village, ses rues pentues où se succèdent boutiques de souvenirs, d’artisanat d’art, et restaurants ; un peu village musée. Un vilain mistral glacial s’est invité et nous accompagnera avec obstination pendant toute la journée

De cette forteresse, gardienne des Alpilles, il ne reste pratiquement rien, et notre guide nous invite à faire preuve de beaucoup d’imagination pour nous représenter l’ampleur et la majesté de cet ensemble fortifié qui avait dû être grandiose.

Le parcours, avec des passages quelques fois plutôt « acrobatiques », est jalonné de grands panneaux colorés explicatifs représentant la vie dans cet environnement si particulier et aride où il n’y avait pas d’eau qu’il fallait aller chercher jusqu’au Val d’Enfer pour la remonter à dos de mulet.

Comme pour illustrer l’esprit belliqueux de cette place forte on a installé d’impressionnants engins de guerre. Le couillard (au nom évocateur dû à sa forme particulière !) peut envoyer des projectiles de 30 à 80 kilos à une portée de 180 m à une cadence de 10 coups à l’heure. Le trébuchet quant à lui, moins rapide que le couillard, a une portée de 400 m. Un autre engin plus léger, la bricole, était manié par des femmes et les vieux. Ces engins imposants étaient loués et arrivaient en pièces détachées et montés sur place.

Le trou aux lièvres intégré au système de défense était un passage souterrain protégé sous la surveillance des gardes postés dans une galerie en surplomb. Des ennemis qui réussissaient quand même à entrer butaient sur une fausse porte et étaient capturés. La Tour Sarrasine : au Moyen Age les razzias des barbaresques, sarrasins, étaient monnaie courante et des hommes en armes y étaient postés en permanence en observation.

La vie s’organisait en « première basse-cour » qui accueillait l’ensemble des fonctions résidentielles et communes. Le seigneur et sa famille logeaient dans le donjon situé tout au sommet. Un grand bâtiment contigu abritait la chapelle, des salles voûtées d’ogives, la citerne et la maison du four. La « seconde basse-cour », isolée de la première par un fossé, abritait quant à elle les ateliers et le personnel domestique. Un peu plus loin d’immenses pigeonniers attestaient de la fortune du seigneur. Des grottes troglodytes servaient d’habitat et de rangement pour conserver l’eau et l’huile.

Outre Frédéric Mistral un autre poète, Charles Rieux, a su chanter les heurs et malheurs de cette contrée où un mausolée lui est consacré. Fils de fermiers illettrés, d’une famille de 10 enfants, il veut devenir poète et encouragé par Mistral écrit en provençal et il a même traduit en Provençal l’Odyssée d’Homère !

Au XIVèmeS le village des Baux comptait 3000 à 4000 habitants ; il y avait un hôpital, des

arènes. Le village est resté longtemps abandonné à partir du XIXe S. Il a été ressuscité à partir de 1950 grâce à l’obstination d’un maire pugnace, Raymond Thuillier, célèbre cuisinier français.

Arès le déjeuner nous nous rendons à la Cathédrale d’Image au Val d’Enfer à deux pas de la cité des Baux, une carrière désaffectée, (température toujours égale à 16°), un endroit à la fois grandiose et chargé de mystère lieu de création de « l’image totale » créé en 1977 par Albert Plécy, journaliste féru d’images. Des grands noms y ont laissé leur signature tels le Commandant Cousteau, Haroun Tazieff et Jean Cocteau l’a choisi comme cadre de son ultime film « le Testament d’Orphée ». Il semble Que la ville des Baux n’ait pas voulu renouveler le bail à l’association. Quid de son devenir ?

Cette année c’est l’Australie (réalisation Jean Charbonneau) dont nous verrons défiler les images, projetées sur les murs, le plafond, le sol. Nous sommes immergés « dans » les images aux couleurs somptueuses. Paradis des oiseaux (700 espèces), des plantes et des animaux étranges, les paysages désolés du busch ou la vie trépidante des grandes villes. Les peintures réalisées par les Aborigènes, hautes en couleur très riches à la symbolique puissante.

L’Australie couleur grande bleue où nous assistons à l’arrivée du voilier L’Endeavour du Capitaine Cook en 1770, sur une côte des plus inhospitalière où plus de 800 navires ont coulé. Et la grande barrière de corail de 2000 km, 5000 îles ou récifs, la plus grande structure vivante sur terre. Les forçats et aventuriers suivront pour peupler ce continent inexploré. L’Australie verte du littoral et l’Australie blanche des villes où vit 90 % de la population.

Par contraste, l’Australie rouge de l’Outback, forêts d’eucalyptus, puis le spinifex, buissons d’herbes piquantes, où vivent les dragons, les goannes, et enfin les immensités rouges où souffle le vent sur un paysage infini, monde du silence, et au milieu de nulle part une baraque, une station multiservice.

Les aborigènes 2,2 % de la population ne forment pas un peuple homogène avec env. 200 langues différentes. Longtemps en bute aux conquérants venus d’ailleurs, maintenant les deux-tiers vivent en milieu urbain.

Un autre continent, un autre monde fascinant par son immensité, sa diversité, ses contrastes, avec un côté un peu mythique à la fois si proche et si loin de notre culture et ses symboles aussi éloignés l’un que de l’autre que sont l’Opéra de Sydney et le Rocher Ayers Rocks.

Michèle Maignal

Novembre 2010